Le briefing de l’industrie, de la mode et du textile en Chine, par Renaud Nicolas Petit
Chaque semaine, l’essentiel de la presse chinoise sur l'industrie, le textile et l'économie circulaire. En français, pour comprendre la Chine et les impacts de ses dynamiques sur le monde.
Sommaire :
Édito :
L’économie chinoise est inquiète, mais les milieux industriels taïwanais se sont préparés au retour de Donald Trump.La revue de presse :
Mode : Sur le marché chinois, une place reste à prendre sur le créneau des vêtements de vélo.
Textile : À Shanghai, le textile hésite entre innovation technique et innovation durable.
Développement durable : La Chine réclame plus de coopérations internationales pour toujours mieux exporter ses énergies vertes.
La Chine et les autres : Xi Jinping fait un premier pas vers Trump.
Edito
L’économie chinoise est inquiète, mais les milieux industriels taïwanais s'étaient préparés au retour de Donald Trump.
La Chine est encore marquée par la première présidence Trump. Pour beaucoup dans tout le pays, il est celui qui a, en quelque sorte, explicité et officialisé la rivalité et l'hostilité entre les deux pays avec sa “guerre commerciale”. (“中美贸易战” en chinois). La presse chinoise s'inquiétait avant l'élection de savoir si un retour de Trump allait signifier une nouvelle hausse des barrières commerciales. De fait, au cours de sa campagne, Trump a déjà évoqué un nouveau tarif de 60 % sur les produits importés de Chine pendant sa campagne. On comprend l’inquiétude de Pékin. Mais que vient faire Taïwan là-dedans ?
De nombreuses entreprises taïwanaises opèrent en Chine avec des usines et des bureaux de représentation. Une nouvelle vague de hausses tarifaires pourrait directement affecter ces entreprises taïwanaises qui exportent depuis le continent. Dès le lendemain de l'élection, le ministre de l’économie taïwanais Guo Zhihui a tenu à rassurer ses concitoyens : des contre mesures sont pensées pour protéger Taïwan du conflit commercial entre la Chine et les États-Unis. Le gouvernement taïwanais s’est même dit prêt à accompagner les entreprises qui envisagent de se retirer de Chine.
Trump représente pour Taïwan à la fois une menace et un enjeu stratégique majeur. En vérité, les Taïwanais s'inquiètent également de voir les relations entre les USA et la Chine se tendent par peur que cette situation ait des répercussions sur la sécurité dans le détroit de Taïwan. L’instabilité et les outrances de Trump font aussi craindre à Taïwan une détérioration de ses propres relations avec les États-Unis. Néanmoins, cette nouvelle présidence contribue aussi à éloigner encore davantage Taïwan de Pékin.
La revue de presse
👗 Mode : Sur le marché chinois, une place reste à prendre sur le créneau des vêtements de vélo.
Source : 163, 12 novembre 2024
La vidéo a fait le tour du monde : des dizaines de milliers d’étudiants chinois parcourent l’autoroute à vélo de nuit entre Zhengzhou et Kaifeng pour manger des raviolis. Ces images illustrent la popularité grandissante du vélo en Chine. Une brève recherche sur le réseau social Xiaohongshu avec le hashtag #cyclisme (#骑行) affiche 700 000 posts et 3,6 milliards de vues. Le marché du vélo est en pleine expansion, et avec lui le marché du vêtement de cyclisme.
Sur Tmall, marketplace en ligne chinoise, les ventes de la catégorie cyclisme ont progressé de 77,8 % cette année. Sur JD.com, le chiffre d'affaires des vêtements de cyclisme a bondi de 127 %. Néanmoins, pour l’instant, aucun acteur ne domine ce secteur en Chine. Les consommateurs chinois se tournent surtout vers des marques spécialisées étrangères (Decathlon, ASSOS, Castelli, Rapha), et quelques acteurs nationaux (Lameda, MBO, GRC). Quelles sont les attentes des chinois en matière de vêtements de vélo ? Les consommateurs chinois sont peu à l’aise à l’idée de commander des vêtements techniques et moulants en ligne, sans essayage. Les marques qui voudront prendre la place de leader sur ce marché devront soit s’implanter en physique, soit faciliter les retours produits. Quoi qu’il en soit, cette niche pourrait offrir une belle opportunité pour un acteur européen, dont l'expertise en matière d'équipements cyclistes est bien établie et déjà reconnue en Chine.
🧵 Textile : À Shanghai, le textile hésite entre innovation technique et innovation durable.
Source : The Paper (澎湃新闻), 12 novembre 2024
Uniqlo, Asics, Zara, Lululemon et d’autres grandes marques internationales sont venues exposer leurs innovations textiles à Shanghai à l’occasion de la China International Export Expo 2024. Ces marques sont loin d'être toutes des championnes de la durabilité et de l'écoconception. Les innovations présentées donnent à voir 2 visions distinctes de l’innovation textile autour desquelles l’industrie chinoise hésite encore. D’un côté : innover pour produire des tissus aux capacités techniques plus développées, au risque d’atteindre un niveau de sophistication parfois superflu (à quoi bon produire des textiles ultra-légers, ultra-performants, ultra-thermorégulants s’ils n’ont d’autres destinée que celle d’être portés dans un contexte urbain, par exemple ?). De l’autre : innover pour produire des matières plus durables, circulaires et bio-sourcées. Deux exemples de ces paradigmes opposés : Uniqlo a, dans un stand immersif de 1 000 m², exploré la thématique “comment rendre la vie meilleure” en proposant une veste en “coton d’air" PUFFTECH ultra-technique et résistants. De l’autre, ASICS, par exemple, a axé son stand sur "L’énergie du mouvement", présentant les nouvelles chaussures de course NOVABLAST 5 et les NIMBUS MIRAI, conçues pour être recyclables et fabriquées avec des fibres polyester uniformes pour faciliter le tri et la réutilisation. Ce dilemme pourrait bien influencer les choix stratégiques de l'industrie textile chinoise, en quête d'un équilibre entre innovation et impact environnemental.
♻️ La Chine réclame plus de coopérations internationales pour toujours mieux exporter ses énergies vertes.
Source : China Today (今日中國), 12 novembre 2024
Le 6 novembre, le septième Forum économique international de Hongqiao a accueilli un forum sur le thème “Commerce durable face aux bouleversements climatiques mondiaux”.
L’occasion pour la Chine de rappeler son point de vue selon lequel la transition ne peut se faire sans coopération internationale complète et de glisser un petit réquisitoire contre les barrières commerciales, au lendemain de l'élection de Trump qui menace d’augmenter à 60 % les tarifs douaniers sur les produits importés de Chine. "Toute politique freinant la transition vers une économie verte mondiale, particulièrement les restrictions commerciales excessives, risque de complexifier davantage la coopération climatique internationale.”, disent les représentants chinois. Un point de vue soutenu par Pascal Lamy, ancien directeur général de l’OMC.
Très original d’un point de vue européen, la Chine se demande aussi si elle ne produit pas trop d'énergies vertes. Xinhua précise que cette critique est formulée non pas par des observateurs chinois eux-mêmes, mais par “certaines voix à l’étranger”.
“La Chine est aujourd’hui le plus grand producteur d’énergie propre au monde. Plus de la moitié de sa production énergétique provient de sources renouvelables", a souligné Wang Huiyao, fondateur et président du think tank Center for China and Globalization. Dès 2021, la Chine s’est positionnée comme le premier exportateur d'énergie verte, en tenant 14,6 % du commerce mondial dans ce domaine. En fait, c’est plutôt la position hégémonique de la Chine qui semble déranger les internationaux. Ce à quoi la Chine répond que les besoins à l’échelle mondiale ne sont pas encore remplis, et qu’il est donc impossible qu’un pays soit en situation de surproduction d'énergie verte.
🌏 La Chine et les autres : Xi Jinping fait un premier pas vers Trump.
Sources : Xinhua (新华网), 10 novembre 2024
Xi Jinping a finalement adressé ses félicitations à Donald Trump après sa réélection. Un message dans lequel le président chinois prend bien soin d'exprimer son espoir de voir se renforcer le dialogue entre les deux pays. Lucide, Xi, dans cette correspondance, évoque clairement des “différends” avec les États-Unis mais dit vouloir trouver une voie de coexistence pacifique au bénéfice du monde entier.
En janvier dernier, pour le 45e anniversaire de l’établissement des relations diplomatiques entre la Chine et les États-Unis, Xi Jinping a réitéré les trois principes fondamentaux énoncés par la Chine pour un partenariat sino-américain sain : respect mutuel, coexistence pacifique et coopération gagnant-gagnant. Ce ne sont pas des idées nouvelles, Xi Jinping les avait déjà exprimées en novembre 2021 lors d’une visioconférence avec Joe Biden.
A l’agence de presse officielle chinoise de conclure : La Chine, fidèle à sa philosophie “La voie de la vertu est celle qui place le bien commun au-dessus de tout” ("大道之行也,天下为公”), souhaite continuer à progresser dans cette direction, avec ou sans le leadership américain.
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